mardi 14 avril 2009

Vocabulaire

Culture: Ensemble de manières de penser, de sentir et d'agir spécifiques aux membres d'une société. La culture désigne également un ensemble hiérarchisé de valeurs qui singularise et oriente l'ensemble des comportements des individus.
Intégration: Processus au cours duquel des populations appelées à vivre ensemble parviennent, malgré leurs différences, à former un ensemble social doté d'une certaine cohésion.
Acculturation:Ensemble des phénomènes résultant d'un contact continu et direct entre des groupes d'individus de cultures différentes et qui entraînent des changements dans les modèles culturels initiaux de l'un des deux groupes au moins.
Sous culture: Culture d'un sous-groupe ayant des caractéristiques propres au sein de la société globale.
Conflits culturels: Opposition masquée ou déclarée entre des modèles culturels, des modes de vie, des règles sociales.

La culture comme contre-partie de la nature

Le sens commun du terme culture se rapporte à la culture savante. On dit d'un individu qu'il est cultivé ou qu'il est inculte. L'anthropologie entend par le terme culture tout ce qui est acquis par l'homme socialisé, par opposition à l'inné.
La culture désigne donc l'ensemble des manières de faire, de penser et de sentir spécifiques aux membres d'une société. La culture se définit aussi par un ensemble hiérarchisé de valeurs qui orientent l'ensemble des comportements des individus.

Extrait de Le fondement culturel de la personnalité, Ralph LINTON, Dunod, 1967, traduction française de The cultural background of personnality, 1945:
"Le terme de culture, tel qu'on l'emploie dans les études scientifiques, ne comporte aucune résonances laudatives qui s'attache à son usage populaire. Il se rapporte au mode de vie global d'une société, et non pas seulement au mode de vie particulier que cette société considère comme supérieur ou plus désirable. Si, par exemple, on applique le mot à notre mode de vie, la culture n'a rien à voir avec le fait de jouer du piano ou de lire du Robert Browning. Pour les sciences humaines, de telles activités ne sont que des éléments de de la culture considérée comme une totalité. Cette totalité comprend aussi bien d'humbles occupations comme faire la vaisselle ou conduire une automobile [...]. Il s'ensuit qu'aux yeux des sciences humaines, il n'y a pas de société, ni même d'individu « inculte » (uncultured). Toutes les sociétés ont une culture, aussi simple qu'elle puisse paraître, et tous les être humains sont « cultivés » (cultured), en ce sens qu'ils participent toujours à quelque culture."

Evolution culturelle

Chaque société dispose d'une culture globale, fruit d'une histoire passée et future. La culture est donc universelle mais prend des formes extrêmement diverses: chaque société dispose d'une culture, et d'une culture qui lui est propre. Par ailleurs, le temps et l'histoire, les contacts culturels comme les évolutions environnementales -écologiques biensur mais aussi économiques et sociales- ne font que modifier la culture d'un peuple. Autrement dit, la culture française en tant que telle n'existe pas. Toutefois, celles d'aujourd'hui comme celle de 1945 existent, bien qu'elles soient distinctes.
Extrait d'Histoire des pensées sociologiques, JP DELLAS, B MILLY, 2005:
"L'acculturation n'est [...] jamais à sens unique. C'est le métissage [...] qui est le mode normal de constitution des cultures. On devrait donc remplacer culture par culturation pour souligner la dimension dynamique de ce processus permanent de construction, déconstruction, reconstruction."

Culture globale et sous-culture

Chaque société est composée de différents groupes sociaux. Ces sous-ensembles d'individus se singularisent par des comportements ou des systèmes de valeurs qui se distinguent plus ou moins de la culture globale. Pour cette raison on parle de sous-culture ou de subculture.
Parler de sous-culture suppose deux choses:

  • les comportements au sein du groupe social sont relativement homogènes,
  • les comportements et systèmes hiérarchisés de valeurs sont bien distincts de ceux de la culture globale.

Extrait de La culture du pauvre, , 1958:

" Vivre au sein d'un milieu populaire, c'est, aujourd'hui encore, appartenir à une culture différente diffuse qui n'est pas moins contraignante et élaborée que celle qui caractérise les classes supérieures. Un ouvrier, accumulerait assurément les pataquès et les gaffes s'il devait assister à un souper collet-monté, mais, s'il devait vivre au milieu des gens du peuple, un grand bourgeois trahirait aussi sûrement sa gaucherie par ses manières de parler – c'est-à-dire aussi bien par son débit que par ses sujets de conversation ou ses tournures de phrases -, par sa façon de se servir de ses mains, par sa démarche ou son maintien et jusque dans sa manière de commander des boissons ou de proposer une tournée. Pour se persuader de la spécificité de la culture populaire, il suffit de songer à ces milliers de détails qui typent un style de vie, par exemple aux modèles de comportement qui régissent les mœurs vestimentaires."

Relativisme culturel et ethnocentrisme

Le regard sur la diversité culturelle doit éviter le risque de l'ethnocentrisme: il n'existe pas une culture (la notre) au centre de toutes les autres et à partir de laquelle toutes les autres sont mesurées, qualifiées ou même jugées. Il faut faire preuve d'un certain relativisme culturel, c'est-à-dire qu'il n'existe pas de critères qui permettent l'ordonnancement des cultures les unes par rapport aux autres.
Extrait de Race et Histoire, Claude LEVI-STRAUSS, 1952:
" L’attitude la plus ancienne, et qui repose sans doute sur des fondements psychologiques solides puisqu’elle tend à réapparaître chez chacun de nous quand nous sommes placés dans une situation inattendue, consiste à répudier purement et simplement les formes culturelles : morales, religieuses, sociales, esthétiques, qui sont les plus éloignées de celles auxquelles nous nous identifions. « Habitudes de sauvages », « cela n’est pas de chez nous », « on ne devrait pas permettre cela », etc., autant de réactions grossières qui traduisent ce même frisson, cette même répulsion en présence de manières de vivre, de croire ou de penser qui nous sont étrangères.[...]
Cette attitude de pensée, au nom de laquelle on rejette les « sauvages » (ou tous ceux qu’on choisit de considérer comme tels) hors de l’humanité, est justement l’attitude la plus marquante et la plus instinctive de ces sauvages mêmes. (…)
L’humanité cesse aux frontières de la tribu, du groupe linguistique, parfois même du village ; à un tel point qu’un grand nombre de populations dites primitives se désignent elles-mêmes d’un nom qui signifie les « hommes » (ou parfois –dirons-nous avec plus de discrétion ? – les « bons », les « excellents », les « complets » ), impliquant ainsi que les autres tribus, groupes ou villages ne participent pas des vertus ou même de la nature humaine, mais qu’ils sont tout au plus composés de « mauvais », de « méchants », de « singes de terre » ou « d’oeufs de pou »."

mardi 7 avril 2009

Intégration et culture

Il existe plusieurs modèles d'intégration, en voici les deux principaux:
  • Le modèle multiculturel d'intégration correspond à des société où l'interpénétration culturelle (melting pot) n'est pas si développée. Avant de s'inscrire dans un processus d'intégration à la société globale, les individus s'appuient sur leur communauté pour construire leur identité. De fait, certaines minorités ethniques peuvent revendiquer une reconnaissance spécifique dans l'espace public. Les politiques 'intégration correspondant à ce modèle ont été mises en oeuvre aux Etats-Unis, en Grande Bretagne et aux Pays-Bas notamment.
  • Le modèle républicain (français) suppose une totale égalité entre les individus: indépendamment de leur diversité culturelle, les particularismes des individus restent d'ordre privé. Dans la sphère publique, le modèle Républicain français refuse que les individus puissent se refermer sur leur propre identité culturelle. Ils se conforment tous au même ensemble de droits et de devoirs. Autrement dit, l'exercice des différences culturelles est limité à la sphère privée.

Chacun de ces eux modèles connaît ses limites: le modèle multiculturel empêche certains groupes de constituer un ensemble social cohérent avec le reste de la population lorsque ceux-ci se renferment sur le communautarisme. Avec le modèle républicain, l'intégration de quelques-uns reste imparfaite dans la mesure où les stigmatisations dont ils sont victimes leur rend plus difficile l'accès au marché du travail, au marché immobilier, ou encore à certains loisirs.

Toute société complexe, à l'image de nos sociétés occidentales, suppose la cohabitation de plusieurs sous-cultures, c'est-à-dire des manières de faire, d'agir, de sentir propres à certains groupes sociaux au sein de la société globale. Pour que ces groupes sociaux se sentent intégrés, ils doivent cohabiter avec le reste de la population, le tout composant un ensemble social cohérent. On comprend donc que:
  • toute société complexe se trouve confrontée à la question de l'intégration,
  • la question de l'intégration n'est pas le seul fait de populations d'origine étrangère.

Sur ce dernier point, faut-il le rappeler, s'il est souvent reproché aux jeunes dits "des cités" de ne pas être "intégrés", la nationalité française est une des (multiples) facettes de leur identité: ils font partie intégrante de la société française.

Acculturation

Le substantif « acculturation » a été créé dès 1880 par J. W. POWEL, anthorpologue américain, qui nommait ainsi la transformation des modes de vie et des pensées des immigrants au contact de la société américaine.
Le processus dit "d'acculturation" se déroule en 3 étapes:
· un processus de sélection (les traits culturels sont empruntés à l'autre groupe)
· un processus de réinterprétation (les traits culturels empruntés sont transformés et adaptés au nouveau contexte)
· un processus de restructuration (la réinterprétation des modèles culturels étrangers implique une restructuration de tout le système culturel)

La culture d’un sous-groupe ou d’une société peut se définir par l’ensemble hiérarchisé de valeurs qui le singularise. Ces idéaux collectifs changent notamment lorsque l’ensemble est durablement au contact d’un groupe social à la culture distincte. S'accomplit alors le processus d’acculturation qui n’a pas besoin de bouleverser fondamentalement les traits culturels d’origine mais favorise leur évolution ou leur enrichissement.
On le voit ici, l’acculturation définit l’emprunt et la réinterprétation de traits culturels d’un autre groupe social.
Extrait d'Histoire des pensées sociologiques, JP DELLAS, B MILLY, 2005:

"Le conseil de la recherche en sciences sociales des Etats-Unis créée en 1936 un comité sur ce thème. […] il publie un célèbre mémorandum sur l’acculturation, qui souligne les trois issues possibles de l’acculturation :

  • L’adoption : un des deux groupes admet la culture de l’autre, l’assimilation a lieu mais elle peut aussi résister, elle continue alors à imprégner les comportements ;
  • La combinaison : une nouvelle culture peut naître de la confrontation, elle sera une synthèse ou une configuration éclectique adaptable selon les comportements et les situations ;
  • La réaction : à cause de l’oppression ou de conséquences imprévues au contact interculturel, des mouvements de contre-acculturation, c’est-à-dire un refus actif, peuvent se produire."